Alors que Gabriel Debru, 17 ans, tente de se faire une place sur le circuit, nous nous sommes posés la question : qu’est-ce qui permet à un jeune joueur de révéler la pleine mesure de son talent ? L’avis de Lionel Roux sur la question.

Gabriel Debru

“Il n’y a pas de règles”, tranche d’emblée Lionel Roux. Non, vous aurez beau farfouiller dans les archives du Tennis Club de Lyon, vous ne trouverez pas ce vieux grimoire aussi magique que poussiéreux signé Henri Cochet, offrant au monde la formule pour devenir un champion. “Les paramètres sont tellement nombreux !” continue Lionel. “C’est à la fois une question d’âge et de maturité. Certains joueurs sont très mûrs à 17 ans, quand d’autres prennent un peu plus leur temps. Ça dépend de la vie de famille, de la place dans la fratrie… On se construit tous différemment.” En bref : une multitude de petites choses. “Et ce sont les additions et les soustractions de toutes ces choses, positives ou négatives, qui font que le joueur se révèle ou non, et plus ou moins tard.”

“C’est bosser, c’est souffrir…”

Au milieu de toutes ces petites choses, il y en a tout de même de plus grandes, essentielles. La plus évidente ? Le talent. “Oui, mais c’est quoi le talent ?” interroge Lionel. “Ce n’est pas uniquement de savoir faire une volée rétro ou un coup droit gagnant. Zidane lui-même expliquait qu’il avait, plus jeune, des copains qui étaient autant, voire plus talentueux que lui. Il en parlait en se marrant !” Ce qui a fait la différence ? “Eux ont moins travaillé. Et, le talent, il est aussi là-dedans : c’est bosser, souffrir, mais aussi prendre du plaisir, avoir envie de faire tous ces sacrifices… Et en sortir avec une niaque énorme.”

“Il faut être entouré et soutenu”

Si le talent est, pour le jeune joueur, ses pieds sur le chemin du succès, le travail serait donc sa chaussure droite. Et sa chaussure gauche ? Son entourage. “Il faut être entouré et soutenu”, continue Lionel. “C’est d’autant plus important qu’aujourd’hui, tout est plus dur pour les jeunes. Moi, à 18 ans, même en étant champion de France Junior, je ne me disais pas que j’allais être joueur pro. Aujourd’hui, les jeunes y sont conditionnés beaucoup plus tôt, ce qui génère une pression énorme.” Pis, il y a les réseaux sociaux… “Ce que l’on peut y lire peut être psychologiquement destructeur. Car certains joueurs lisent tout ce qui s’écrit… Tout. Il faut être blindé, éduqué par son entourage. Sinon, on peut vite basculer dans l’euphorie, comme dans la dépression.” Et en oublier l’essentiel : se lever tous les matins pour travailler.

Dans une interview pour le magazine Courts, le papa d’un jeune prodige belge expliquait sa façon de gérer cette pression : “En tant que parent, je m’efforce d’être stable dans cette vie instable, jalonnée par des “up ans down”. Il faut trouver le savant mélange entre : être présent tout en sachant rester en retrait.” Avant d’ajouter : “Le tennis est un sport où la réussite n’est pas tout le temps à la hauteur du travail fourni.” Et oui, même avec de bonnes jambes et une paire de chaussures, le chemin vers les sommets est aussi long que semé d’embûches !